Olaïsha Francis
L’établissement hospitalier, connu à l’époque sous le nom d’Hôpital Saint-Louis-Marie-de-Montfort, a été créé en 1953 par la congrégation des Filles de la Sagesse.
L’hôpital conclut un accord avec l’Université d’Ottawa en 1992. La collaboration entre la faculté de médecine et Montfort porte sur l’enseignement clinique de la médecine familiale en français. Le 24 février 1997, alors que le développement de l’Hôpital et de ses extensions se poursuit, la Commission de restructuration des services de santé de l’Ontario suggère de fermer le seul hôpital universitaire francophone à l’ouest de la province de Québec.
L’effet de choc est immédiat et engendre rapidement SOS Montfort, un groupe militant engagé dans la préservation de cette institution considérée comme vitale pour la survie de l’Ontario français. Cette situation provoque la plus grande manifestation politique de l’histoire de l’Ontario français en 1997, avec 10 000 personnes réunies au centre municipal d’Ottawa pour lutter contre cette décision. Le 7 décembre 2001, après cinq ans de résistance, Montfort réussit à obtenir une victoire décisive devant la Cour d’appel de l’Ontario. Monfort est véritablement un point tournant dans l’histoire de l’Ontario français et de la francophonie canadienne en général.
De cette histoire est né, le 17 septembre, le livre Le moment Montfort dans la francophonie canadienne, sous la direction de François Charbonneau, professeur agrégé à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa et Michel Bock, professeur titulaire au département d’histoire de l’Université d’Ottawa, avec les contributions de Marcel Martel, Serge Miville, François-Olivier Dorais, Marie-Claude Thifault, Pierre Foucher, Mariève Forest, Anne Gilbert et Louise Bouchard, une coédition entre le Centre de recherche sur les francophonies canadiennes et les presses de l’Université d’Ottawa. Ce livre analyse l’histoire mouvementé du seul hôpital francophone mais aussi des suites du mouvement Montfort et de son impact jusqu’à aujourd’hui.
« L’hôpital est comme une sorte de laboratoire qui nous permet de mieux comprendre l’évolution de la condition politique des communautés francophones au tournant du 21e siècle et permet de mieux comprendre l’Ontario français et la francophonie canadienne dans une étape plus récente de son développement et de son histoire socio-politique » explique Michel Bock.
Le moment Montfort dans la francophonie canadienne est destiné à la fois aux collègues du monde universitaire dans différentes disciplines sans être un livre jargonneux. « On voulait qu’il soit accessible à un public aussi élargi que possible sans rien sacrifier de la rigueur scientifique de nos contributions respectives. On voulait aussi qu’un public non-universitaire, non-spécialiste, qui s’intéresse à la question de la francophonie ontarienne et canadienne depuis la fin du 20e siècle, puisse le lire et l’apprécier », ajoute le coéditeur du livre.
« Le mérite du livre revient à François Charbonneau, ajoute-t-il, c’est de lui que vient l’initiative pour les 25 ans de la crise. Il a rassemblé des collègues qui travaillent sur des questions connexes intéressés à collaborer dans ce projet. »
Un chapitre a été consacré par le professeur Charbonneau à la perception de la crise de l’Hôpital Monfort chez les Anglo-Ontariens. La conclusion qu’il en tire est que l’opinion anglophone de l’Ontario considérait souvent la crise comme une affaire québécoise. Ce dont elle ne faisait pas partie.
François-Olivier Dorais a fait un chapitre un peu semblable sur la façon dont Monfort a été perçu par le Québec, pour montrer qu’il y a parfois un élan de solidarité étonnant de la part de la classe politique, journalistique et citoyenne au Québec.
Michel Bock a fait un texte sur les divisions à l’intérieur même de la communauté franco-ontarienne sur l’opportunité de sauver le bien-fondé de la sauvegarde de l’hôpital. Contrairement à ce que l’on peut penser, ce n’est pas tous les Franco-Ontariens qui étaient d’accord avec la sauvegarde de l’hôpital.
Le juriste Pierre Foucher a fait une étude extrêmement éclairante sur Montfort dans la jurisprudence. Ce qui a permis de créer des précédents juridiques pour la revendication de nouveaux droits devant les tribunaux pour les communautés francophones en milieu minoritaire.
Chaque auteur a produit un chapitre sur le thème de leur choix avec la liberté d’aborder la question selon leurs préférences. Une fois tous les textes rassemblés, le livre a été évalué selon la méthode universitaire puis publié.
Le moment Montfort dans la francophonie canadienne est disponible sur le site web de Les Presses de l’Université d’Ottawa en version papier ou e-pub. Il est aussi en vente dans certaines librairies francophones telles que la Librairie du soleil à Ottawa ou dans la librairie-boutique de la Place des Arts du Grand Sudbury.
« Il y a eu un moment Montfort et on vit encore aujourd’hui les suites de celui-ci. Ce livre est un bon départ pour mieux comprendre la condition des francophones et les différentes dynamiques qui sont à l’œuvre à l’heure actuelle », conclut Michel Bock.
Photo : Le moment Montfort dans la francophonie canadienne est disponible en papier ou e-pub.